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De rêves et de plumes

L’écriture a croisé ma vie, un jour, par hasard, ce ne fut pas la visitation de l’ange au petit matin mais quelque chose de tardif et plutôt imprévu. Si vous parcourez mon blog vous trouverez quelque part l’histoire cette rencontre qui m’invita un soir à l’écriture, car ce ne fut pas une révélation mais une invitation, un geste d’amitié qui continuent à accompagner ma vie. Dans ce blog vous trouverez des lieux, et parfois mêmes des lieux communs, des états d'âmes aussi et , j’espère, un peu de style.

Qu'est-ce qu'un couple?

On a beaucoup écrit sur le couple, c'est la bouteille à l'encre de tous les romans, même les plus sirupeux ne peuvent empêcher, à moins de paraître totalement farfelus, de laisser s'y incruster quelques situations douloureuses, pénibles, criardes, désagréables, parfois abscons qui sont , plus souvent que l'on veut bien l'admettre, le quotidien des couples. Bizarrement malgré les milliards d'années d’expérience qu'a engrangées l'humanité toute entière sur le sujet, nous continuons à sombrer dans les mêmes travers et œuvrons parfois sans désemparer mais non sans succès, à transformer le plus banal des objets en détonateur d'une explosion thermonucléaire. Combien de soirées se sont vues ainsi ruinées du seul fait de quelques vagues traces de dentifrice perdues au fond d'un lavabo. Vous trouverez sans doute à ce texte de déplaisants relents de misogynie, une sorte de politiquement incorrecte qui fera bondir la lectrice et sourire le lecteur, par avance je vous en demande pardon, non pas que je regrette ces quelques lignes mais je n'ai pas l'imagination assez fertile pour me glisser dans la peau d'une femme, handicap regrettable et sur lequel je travaille durement , je vous prie de me croire.

On attribue à Oscar Wilde cette citation : « être un couple c’est ne faire qu’un mais lequel ? », bien que j’ai toujours nourri un doute sur le fait qu'il en fut l'auteur, j’ai toujours trouvé une évidente pertinence à cet aphorisme.

Rien ne vaut une petite phrase ironique d’un homosexuel notoire pour initier quelques puissantes remarques sur le couple.

Je ne crois pas avoir sur le sujet plus d’expérience qu’un autre, nous avons tous notre lot d’échecs et de frustrations, il suffit de croiser dans la rue n’importe quel quidam affichant son paquet de décennies fatiguées pour obtenir un avis définitif rarement teinté d’optimisme. J’exclus les moins de vingt ans et les plus de quatre-vingt, les uns pour trop en espérer et les autres pour ne plus rien en attendre, il n’est pas rare que l’ignorance absolue ait autant de défaut que l’extrême pratique, quoiqu’il est vrai que la jeunesse tend à pratiquer la chose sans rien en comprendre et que la vieillesse en a compris beaucoup sans plus pouvoir la pratiquer,  les fantasmes d'un jour alimentent les regrets du lendemain. 

A bien y réfléchir les incompatibilités d'humeur sont moins nombreuses que les incompréhensions: la femme rêve d’absolu quand l’homme aspire au confort, le jour du mariage l'homme vérifiera sa braguette quand la femme se retrouvera flottante dans un monde tout en voilage, inévitable hiatus qui signe la fin précoce de bien des commencements, un quotidien de bruit et de fureur durera plus longtemps que les silences indifférents.

Nous sommes donc tous logés à la même enseigne on peut sur le sujet en faire une tartine existentialiste, n’ayant peur d’aucun ridicule je me grimerai en Onfray aux petits pieds, nouveau pape de la phénoménologie des ménages en dérive, m’autoproclamant le Merleau-Ponty des cages d’escaliers, des lits défaits et des éviers bouchés.

La chose est tentante mais l’énergie à y mettre me semble un rien surdimensionnée pour un sujet aussi galvaudé.

J’ai récemment lu une étude des plus pertinentes : plus vous vous mariez tard moins vous avez de chance de divorcer, bref restez célibataire jusqu’à la retraite vous éviterez divorce et enfant.

Chacun doit savoir jouer sa partition, même si reconnaissons-le quand le couple part en vrille la musique tient d’avantage d’un Messerschmidt en piquet que d’un solo de piano, ou pour ceux qui n'auraient pas mon poids de décennies: on est d'avantage dans les Gardiens de la Galaxie que dans La La Land.

Exprimant là un point de vue très personnel et hautement phallocratique, j'affirme que l’homme est la victime expiatoire de cette comédie des illusions perdues, d’ailleurs n’est-ce pas les femmes qui sont le plus souvent les premières à demander le divorce ?

D'ailleurs ce fut mon cas: un jour ma moitié me fit part de son intention de mettre un terme à cette cohabitation que j’avais su endurer avec une certaine placidité et beaucoup d’absences.

Ma femme était et, je le suppose, est toujours, une personne charmante.  Ce jugement en vaut un autre mais tout est question de circonstance : je la trouvais charmante car nous avions très tôt su faire usage de ce que la technologie proposait de mieux en matière de communication à distance.

Par ailleurs la pérennité de notre relation était durablement étayée par le nombre conséquent de déplacements hebdomadaires, chaque jour qui s’écoulait voyait notre passion s’épanouir au long des messages téléphoniques, les mots se suffisaient à eux-mêmes nous étions précocement dans l’épistolaire digital. Mes voyages étaient de ce point de vue l’apothéose d’un certain bonheur conjugal, grâce à la magie des standards téléphoniques nous étions ce qui se faisait de mieux en matière de couple exemplaire, à noter que l’arrivée du téléphone mobile ne changea rien à la chose, bien au contraire, nul besoin de courir après l’éventuelle cabine téléphonique ,au fonctionnement aléatoire, l’hygiène déplorable et le fond sonore pas toujours maîtrisé, le téléphone mobile permit à notre couple de renforcer l’harmonie à laquelle chacun légitimement aspire : rarement ensemble, souvent ailleurs, bref dans nos ailleurs respectifs nous formions un couple exemplaire et je me reconnais un certain succès à avoir préserver la nécessaire distance qui garantit l’unité de notre couple.

Les sentiments ne sont un ciment que pour ceux qui en ont, et ils sont rares, pour les autres seul le ressentiment a des chances de croitre et embellir. Le quotidien est abrasif : les cheveux dans l’évier, les toilettes asphyxiantes, le linge entassé dans un coin, embaumant la pièce d'un parfum discutable, le réfrigérateur vide, la vaisselle entassée, la poussière qui monte en volutes, ces petits riens cumulés en font bien d’avantage pour le ruine d’un couple q'une aventure extra-conjugale, souvent sans lendemain et plus matière à frustration coupable qu’à satisfaction durable.

Notre couple s’épanouissait dans l’absence.

Malheureusement les aléas du métier et du monde professionnel firent que je me trouvais un jour promu à un poste plus élevé mais aussi plus assis, adieu les voyages au long court, les absences régulières et durables, mon quotidien fut brutalement atteint d'une stabilité douloureusement imprévue: chaque matin je quittais ma femme et le domicile habité de l’effrayante certitude que je les retrouverai les mêmes , inchangés et inchangeables,  le soir venu. Les longues journées des cadres s’expliquent aisément quand on va ausculter la fastidieuse banalité des soirées familiales.

 A l'heure où le cade épuisé de journées sans charme ne rêve que d'apéritif bien tassé affalé devant le journal du Vingt-heures, je rentrais chez moi,  à peine avais-je franchi le pas de la porte que ma femme se lançait dans une logorrhée compulsive déroulant tout le film de la journée, pas une heure, pas une minute, ni même une éventuelle seconde,  ne m’étaient épargnée dans ce épais bréviaire du quotidien. Comment ma femme qui portait si peu d’intérêt aux panneaux routiers en arrivait à mémoriser chaque détail qui émaillait sa journée, ne laissait de m’étonner. Ce concours de banalités n’aurait rien eu de très gênant en soi, si mon désintérêt poli, ne finissait par se fendiller au fil des jours, laissant inévitablement transparaître une absolue et consternante indifférence à sa diarrhée verbale : mon regard glissait inévitablement vers l’écran de télévision, mon oreille se penchait progressivement vers les informations internationales, je me perdais dans l'observation attentive des cuticules de mes ongles, ou m'intéressais avec frénésie à la propreté de mes lunettes,  ses diatribes ménagères ne trouvaient comme seule réponse que mon silence distrait.

Rien que du très banal dans ce désintérêt poli mais curieusement  elle le ressentait comme une insulte impardonnable motif supplémentaire d'une rancœur qui malheureusement alimentait la chaudière de son exaspération, j’abandonnais l’idée de suivre les informations et me retranchait dans quelques lieux éloignés, j’avais appris depuis longtemps que dans les relations de couple l'homme sage sait se montrer lâche et surtout adepte des distances.

Heureusement le choix chaque jour grandissant des outils de communications permettaient à ma femme de chercher ailleurs une oreille, si ce n’est attentive, à tout le moins secourable, au pire nous avions quelques chats qui arrivaient fort bien, et sans défaillir, à remplir cette tâche.

Je ne suis pas un passionné des activités sportives telles que beaucoup les pratiquent le soir venu, j’aime me détendre sans dépense d'énergie excessive, je sombre aisément dans une léthargie contemplative que ce soit en regardant vaguement la télévision,  en feuilletant un livre, un journal, ou en me perdant dans l'observation rêveuse du mouvement des nuages, passe-temps hautement lénifiant qui gagnerait à être pratiqué d'avantage. Malheureusement ma femme n’a jamais compris ni supporté le silence, que ce soit son babillage, la radio, la télé ou toute autre source sonore, elle ne semblait s’épanouir que dans le bruit, cela pouvait aller jusqu’à certains excès, ainsi la salle de bain et la chambre sont séparés par un couloir long d’à peine trois mètres, tout au plus, il ya une radio dans chacune des  deux pièces, toutes les deux allumées, avec d’ailleurs un curieux effet d’écho perturbé par le son anachronique de la télévision qui fonctionne en continu.

Je me garderai bien de dire que tout ceci représentait une insupportable nuisance sonore, ce serait très excessif, pas inexacte mais excessif, j'y voyais là le travers naturel de ma femme, j'en ai aussi quelques-uns, je crois.

il ne fallut donc pas longtemps pour réaliser à quel point ma promotion professionnelle pouvait nuire gravement autant à l’harmonie du couple qu’à ma sérénité, je m’en ouvrais à mon directeur qui, cumulant un nombre conséquent de divorces, me semblait l’individu le plus apte à me fournir un avis précieux. Je dus d’abord le convaincre que je n’avais pas mis le divorce dans mes objectifs premiers, une petite feuille de calcul avait contribué rapidement à refroidir mes éventuels velléités en la matière, c’est étonnant de voir combien la moindre soustraction peut réduire à rien les élans les plus vindicatifs.

Ayant fini par accepter ma surprenante résignation à ne rien changer à mon statut marital,  il se rendit à l’évidence que seule une rétrogradation pouvait me permettre de retrouver ma nécessaire sérénité, c'est ainsi qu'en creusant un peu , et en tordant quelques chiffres, le tout au nom de notre amitié, alimentée il est vrai par son antipathie affichée à l’égard de ma femme, il me tailla sur mesure un poste à forte teneur de kilométrages arrimés à une dose massive de nuits d’hôtel, je retrouvai le goût de l’existence et rentrait chez moi toute à la joie de préparer ma petite valise.

Quelques années et un divorce plus tard j’appris que mon patron avait trouvé opportun d’occupé de façon très horizontale les après-midi de ma femme, je suppose que le brave homme espérait ainsi diminuer le flot de parole de mon épouse sur son compte-rendu quotidien, j’ai regretté de ne pas avoir eu plus tôt écho de cette initiative, nous aurions pu essayer d’œuvrer ensemble pour y trouver une efficacité que je n’avais pas perçu à l’époque.

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